RAPPORT N°10/AKA/2025
Période : Mois de Octobre
Date : le 1er Novembre 2025
Introduction
Observatoire de Veille Citoyenne pour la Défense des Droits Humains du Peuple de l’Azawad, l’Association Kal Akal est une organisation membre de la société civile dont le siège social se trouve dans la région de Kidal.
Elle a, entre autres, pour objectifs la défense des droits humains du Peuple de l’Azawad, la préservation et la promotion de la culture touarègue, l’éducation et le renforcement de la cohésion sociale.
Dans le sillage du conflit en cours, l’Association s’est focalisée principalement sur la question des droits humains, dans le dessein de documenter toutes les violations perpétrées contre les populations civiles par les Forces armées maliennes (FAMa), accompagnées de la milice russe du groupe Africa Corps, ainsi que par les groupes armés tels que le JNIM et l’État islamique au Grand Sahara (EIGS).
Ces violations, de plus en plus systématiques, ciblent particulièrement les communautés touarègues, arabes et peules de l’Azawad et du centre du Mali. Elles se traduisent par des exécutions sommaires, frappes de drones, disparitions forcées, pillages, tortures, destructions d’infrastructures civiles et atteintes graves aux biens et aux moyens de subsistance.
L’Association Kal Akal, à travers son réseau de relais communautaires, s’emploie à documenter rigoureusement toutes ces exactions, sur la base de témoignages directs, d’éléments matériels et de recoupements d’informations.
Les faits recensés sont ensuite compilés dans un rapport mensuel destiné à informer l’opinion nationale et internationale de la situation dramatique vécue par les populations civiles.
Ainsi, au cours du mois d’octobre 2025, l’Association Kal Akal a recensé et documenté les violations suivantes :
I. EXÉCUTIONS SOMMAIRES ET FRAPPES AÉRIENNES : 78 cas confirmés
- 1er octobre – Tessalit (Kidal) : Le couple FAMa/Africa Corps basé à Amachach a lancé des obus sur le quartier Ahamboubar et le centre-ville de Tessalit. Les projectiles ont frappé la seule zone encore habitée par trois familles, faisant plusieurs victimes :
- Mahmoud Ag Ossad Alher (87 ans), tué sur le coup ;
- Lalla wt Mahmoud (40 ans), femme handicapée mentale et physique ;
- Ika wt Mahmoud (3 ans) ;
- Lewa walet Malick (5 ans).
Un autre obus est tombé à 50 mètres du rond-point central de Tessalit.
- 8 octobre – Sévaré (Mopti) : Deux Touaregs, dont Oussa Ag Aliou, exécutés sommairement par des soldats maliens alors qu’ils accompagnaient un cousin malade.
- 12 octobre – Intabazaz : Une frappe de drone malienne a tué trois civils dont le chauffeur Abdou Ag Intabourak et blessé deux autres.
- 13 octobre – Gabéro (Gao) : Deux civils tués par des hommes armés non identifiés à proximité du village de Kobi, alors qu’ils se rendaient au marché de Hausa Foulane.
- 13 octobre – Marché hebdomadaire de Tinach, région de Kidal : Une frappe aérienne conjointe FAMa/Africa Corps a tué au moins trois civils
- 15 octobre – Balel (Ségou) : Massacre de dix civils, dont une vieille femme, par les FAMa et les milices Donsos dans le village bambara de Balel (commune de Dougabougou).
- 18 octobre – Djencheché (Kidal) : Deux frappes de drones ont visé un campement nomade, tuant deux femmes et trois enfants réfugiés sous une tente,
- 24 octobre – Région de Tombouctou (Doma et Farach) :
- Première frappe à Doma sur le véhicule civil d’Ataye Ag Alhousseini (aucune victime).
- Seconde frappe à Farach, touchant un campement familial : quatre civils tués, dont deux hommes et deux femmes d’une même famille.
- 26 octobre – (Tessit, Gao) : Les combattants du Daech (EIGS) ont tué Bay Ag Mohamed, blessé Moussa Ag Intadawalen,
- Le 23 octobre 2025, des soldats maliens, épaulés par des chasseurs traditionnels dozos, sont soupçonnés d’avoir exécuté une trentaine de civils près de Markala , région de Ségou au centre du pays.
- Le 29 octobre 2025, une frappe de drone malien a visé une cérémonie de mariage à Beydy l’ouest de Gossi, faisant vingt et une (21) victimes, dont trois hommes, tandis que les autres étaient des femmes et des enfants.
II. ENLÈVEMENTS, DISPARITIONS FORCÉES ET TORTURES : 11 cas confirmés
- 2 octobre – Kidal (ville) : Trois membres de la tribu Doussahak arrêtés par les FAMa et transférés vers une destination inconnue.
- 17 octobre – Dofana (région de Tombouctou) : Enlèvement de Bouka Ag Med Ibrahim (fraction Imghad Taroma) et de l’imam du village de Sinekaye (Kel Essouk).
- 16–17 octobre – Tidjachiwene, (Kidal) : Plusieurs civils arrêtés, torturés et dépouillés.
- Parmi eux : Abdalah Ag Azwaymar (15 ans), torturé puis exécuté par balles à bout portant.
- Les autres détenus identifiés : Andawant Ag Azwaymar, Bay Ag, Aljamat Ag Abzayak.
III. PILLAGES, DESTRUCTIONS ET SACCAGES DE BIENS CIVILS : 9 cas confirmés
- 2 octobre – Elewidj (Aguelhok) : Démantèlement du système solaire alimentant un puits et destruction du réservoir principal d’eau, privant le village d’approvisionnement.
- 17 octobre – Aguelhok : Le convoi FAMa/Africa Corps a incendié la moto d’un éleveur, tué une trentaine de chèvres et plusieurs bovins.
- 12–13 octobre – entre Gao et Anefif : Le même convoi a commis plusieurs exactions, notamment la destruction de véhicules et le vol de biens civils abandonnés.
- Les combattants du Daech (EIGS) ont pillé les biens et enlevé quatre civils dont le sort reste inconnu.
- 27 octobre – Tin Adjarof (Tessit) : Pillage massif de troupeaux appartenant aux communautés Oudalane et Idarfane par le JNIM.
IV. CONSÉQUENCES HUMANITAIRES ET ENVIRONNEMENTALES: 47 cas confirmés
Les bombardements et frappes de drones sur des zones habitées ont entraîné :
- Des pertes humaines élevées (femmes, enfants, vieillards), notamment à Tessalit, Djencheché et Farach.
- Des déplacements massifs de familles vers les zones rurales et frontalières.
- Des pertes de cheptel et destruction des infrastructures vitales (réservoirs d’eau, panneaux solaires, véhicules civils).
- Des incendies de brousse déclenchés par les frappes (Ahanawa, Doma).
- Une contamination environnementale durable due à la présence d’engins non explosés et de débris militaires.
V. VIOLS ET VIOLENCES SEXUELLES : 0 cas confirmés
Aucun cas documenté au cours du mois, bien que des témoignages indirects signalent des violences commises lors d’arrestations arbitraires.
VI. DÉGÂTS ENVIRONNEMENTAUX : 4 cas confirmés
- Tessalit (Kidal) : Les obus lancés par le couple FAMa/Africa Corps sur le quartier d’Ahamboubar ont provoqué des incendies de zones habitées et la destruction d’habitations traditionnelles en banco, ainsi que la pollution des puits voisins par les débris explosifs.
- Ahanawa, vallée de Tinchamaren (Kidal) : La frappe de drone du 23 octobre a déclenché un incendie de brousse qui s’est étendu sur plusieurs hectares, détruisant une zone pastorale essentielle à l’alimentation du bétail.
- Elewidj (Aguelhok) : Le démantèlement du système solaire alimentant le puits et la destruction du réservoir principal d’eau ont gravement affecté l’écosystème local et privé le village de toute source d’eau potable, aggravant la désertification.
- Farach (Tombouctou) : Les frappes aériennes du 24 octobre ont causé la destruction de tentes et de végétation, laissant le site contaminé par des munitions non explosées et des résidus chimiques dangereux pour les habitants et le cheptel.
Conclusion
Le mois d’octobre 2025 s’inscrit dans la continuité d’une détérioration alarmante de la situation sécuritaire et humanitaire en Azawad. Les forces armées maliennes et leurs alliés de l’Africa Corps poursuivent une campagne de terreur caractérisée par des frappes indiscriminées, des exécutions sommaires et des pillages massifs.
Les groupes armés terroristes tels que le JNIM et l’EIGS profitent du vide sécuritaire pour multiplier leurs attaques contre les civils, aggravant davantage la précarité et la peur au sein des populations.
L’Association Kal Akal dénonce avec la plus grande fermeté ces crimes de guerre et crimes contre l’humanité, et interpelle la communauté internationale sur son silence coupable face à la souffrance du peuple de l’Azawad.
Elle appelle :
- à l’ouverture immédiate d’enquêtes internationales indépendantes ;
- à la mise en place de mécanismes de protection des civils dans toutes les zones affectées ;
- à la condamnation publique et sans équivoque des auteurs et commanditaires de ces crimes ;
- et à l’adoption de sanctions internationales contre toutes les parties responsables.
Le droit international humanitaire ne doit pas rester lettre morte.
Face à la banalisation des massacres et à l’impunité, le silence n’est plus une option.
Fidèle à sa mission, l’Association Kal Akal poursuivra son travail de documentation, d’alerte et de soutien aux victimes, pour que justice soit rendue et que la dignité du Peuple de l’Azawad soit enfin reconnue et protégée.
Quelques images des violations :
1-Frappe d’un drone de l’armée malienne le 4 octobre 2025 sur un véhicule civil à In_Gouzmi dans la région de Tombouctou le faisant 1 mort

2- Une fosse commune contenant les corps de quatre civils exécutés par des éléments de Daech à Intabzaz, dans la région de Kidal, le 26 octobre 2025.

3- Une frappe d’un drone malien le 29/10/2025 a ciblé un mariage à l’ouest de Gossi causant la mort de vingt un (21) personnes dont la plupart sont des femmes et enfants

